Biographie de R. A. Reiss

Rodolphe Archibald Reiss (1875-1929), points de vue

Biographie de Rodolphe Archibald Reiss (1875-1929)

 

Anne Develey

1. Auteur inconnu, Portrait de R. A. Reiss, date inconnue.
https://collections.unil.ch/idurl/1/44984

Rodolphe Archibald Reiss est né en 1875 à Hechtsberg en Allemagne dans une famille aisée de notables (fig. 1). A l’âge de 18 ans, il rejoint l’Université de Lausanne pour entreprendre ses études de chimie qui le mèneront à un doctorat ès sciences obtenu en 1898 (fig. 2). Reiss acquiert la nationalité suisse en 1901. Il s’établit à Pully à proximité de Lausanne en 1904 où il se fait construire une maison, la Villa Lumière (fig. 3). 

2. R. A Reiss, R. A. Reiss lisant, date inconnue. 
https://collections.unil.ch/idurl/1/53000


3. R. A. Reiss, « M. Reiss. Photo de la Villa Lumière », 1921. 
https://collections.unil.ch/idurl/1/55561


Passionné par la photographie, Reiss est membre du Photo-Club de Lausanne et de la Société des photographes suisses, et devient rédacteur de deux revues photographiques : le Journal suisse des photographes (de 1900 à 1909) et la Revue suisse de photographie (de 1902 à 1906) dans laquelle il signe de nombreux articles, en particulier sur les procédés chimiques et techniques de la photographie.
Reiss s’intéresse aussi bien aux usages artistiques du médium qu’à ses applications médicales et scientifiques, notamment en poursuivant des recherches en radiologie (fig. 4).


4. Association pour la photographie et les arts voisins, Francfort-sur-le-Main. Exposition du jubilé 1900. R. A. Reiss reçoit la médaille de bronze pour ses mérites en matière de photographie scientifique. 

Dans les années 1900, il s’oriente progressivement vers les applications judiciaires de la photographie. Alors chef des travaux photographiques de l’Université de Lausanne (1899-1906), Reiss se rend à Paris vers 1900 pour parfaire ses connaissances en criminalistique auprès d’Alphonse Bertillon (1853-1914), figure notable de cette nouvelle discipline, alors responsable du service d’identification de la Préfecture de Police de Paris (fig. 5). 


5. R. A. Reiss, Portrait d’Alphonse Bertillon, date inconnue. 
https://collections.unil.ch/idurl/1/56864


Bertillon fait partie des pionniers qui, à cette période, élaborent des techniques d’identification tels qu’Edmond Locard (1877-1966), directeur du laboratoire de police technique de Lyon, le juriste autrichien Hans Gross (1847-1915), et Salvatore Ottolenghi (1861-1934), fondateur de l’Ecole de police scientifique de Rome. Bertillon a mis au point la technique de l’anthropométrie judiciaire (aussi nommée bertillonnage), une méthode d’identification des individus fondée sur des mesures osseuses. Bertillon enrichit ce signalement descriptif détaillé de clichés signalétiques non retouchés suivant un protocole précis. 

En 1901, Reiss obtient le titre de privat-docent de photographie à l’Université de Lausanne où il donne, dès 1902, un cours sur les applications judiciaires de la photographie qui intègre les enseignements de Bertillon sur les procédés de photographie signalétique (fig. 6-10). Son ouvrage La photographie judiciaire, qu’il dédie à Alphonse Bertillon, sort l’année suivante.  

6. R. A. Reiss, « Cliché signalétique de Rognon », 1908.
https://collections.unil.ch/idurl/1/53167

7. M. A. Bischoff, « Photographie signalétique sytème Bertillon », date inconnue.

https://collections.unil.ch/idurl/1/55708

8. M. A. Bischoff, « Photographie signalétique sytème Bertillon », date inconnue.

https://collections.unil.ch/idurl/1/55864

9. Portrait signalétique de R. A. Reiss, 1900, fonds IPS/UNIL.

10. Portrait signalétique d'Alphonse Bertillon, 1897, fonds IPS/UNIL.


En 1906, il est nommé professeur extraordinaire de photographie scientifique avec applications aux recherches judiciaires. Sa leçon inaugurale est intégralement publiée dans la revue française Archives danthropologie criminelle, de criminologie et de psychologie normale et pathologique dirigée par Alexandre Lacassagne (1843-1924), professeur de médecine légale à la Faculté de médecine de Lyon. Il y souligne l’importance du rôle occupé par la photographie dans la résolution d’enquêtes criminelles. La reconnaissance officielle et institutionnelle de la police scientifique comme discipline académique sera obtenue en 1909 avec la création par Reiss de l’Institut de police scientifique de l’Université de Lausanne (actuelle Ecole des sciences criminelles) délivrant le titre de Diplôme de police scientifique (fig. 11-18). 

11. R. A. Reiss, Laboratoire de l’Institut de police scientifique, date inconnue. 
https://collections.unil.ch/idurl/1/50153

 

12. R. A. Reiss, M. A. Bischoff, « Institut de Police scientifique. Vue de l’armoire pièces à conviction », date inconnue. 
https://collections.unil.ch/idurl/1/49778
13. R. A. Reiss, M. A. Bischoff, « Institut de Police scientifique. Vue du laboratoire 1 », date inconnue. 
https://collections.unil.ch/idurl/1/44412

14. R. A. Reiss, M. A. Bischoff, « Institut de Police scientifique. Vue du laboratoire 1 », date inconnue. 

https://collections.unil.ch/idurl/1/44672

15. R. A. Reiss, M. A. Bischoff, « Institut de Police scientifique. Vue du laboratoire 2 », date inconnue. 

https://collections.unil.ch/idurl/1/45568

16. R. A. Reiss, M. A. Bischoff, « Institut de Police scientifique. Vue du laboratoire 2 », date inconnue. 

https://collections.unil.ch/idurl/1/49050

17. R. A. Reiss, M. A. Bischoff, « Institut de Police scientifique. Vue du laboratoire 2 », date inconnue. 

https://collections.unil.ch/idurl/1/45037

18. R. A. Reiss, M. A. Bischoff, « Institut de Police scientifique. Vue d'une chambre noire », date inconnue. 

https://collections.unil.ch/idurl/1/46522


Le nouvel institut va rapidement bénéficier d’une importante reconnaissance internationale. Les nombreux articles et ouvrages publiés par son fondateur tels que Manuel du portrait parlé (1905), puis surtout Manuel de police scientifique (technique) : vols et homicides (1911) confèrent à Reiss une autorité indiscutable. Sollicité par plusieurs pays, dont le Brésil, la Russie et l’Autriche, Reiss diffuse son savoir-faire en criminalistique en effectuant des expertises et en donnant des conférences et des formations. 

Lors de la Première Guerre mondiale, sa carrière prend un tournant décisif. En septembre 1914, il se rend en Serbie pour enquêter sur les crimes de guerre commis par l’armée austro-hongroise sur invitation du gouvernement serbe (fig. 19-24). Ses rapports scientifiques, ouvrages et chroniques de guerre tout comme son travail photographique documentent et dénoncent les atrocités dont il est témoin. Reiss démissionne de l’Institut de police scientifique en 1919, date à laquelle il s’installe définitivement à Belgrade, où il décède en 1929.

19. R. A. Reiss, Reportage de guerre en Serbie, [1914-1918].
https://collections.unil.ch/idurl/1/49204

20. R. A. Reiss, Reportage de guerre en Serbie, [1914-1918].
https://collections.unil.ch/idurl/1/52431

21. R. A. Reiss, Reportage de guerre en Serbie, [1914-1918].
https://collections.unil.ch/idurl/1/45036


22. R. A. Reiss, Reportage de guerre en Serbie, [1914-1918].
https://collections.unil.ch/idurl/1/48944

23. R. A. Reiss, Reportage de guerre en Serbie, [1914-1918].

https://collections.unil.ch/idurl/1/44359


24. R. A. Reiss, Reportage de guerre en Serbie, [1914-1918].

https://collections.unil.ch/idurl/1/47740


 


 

Bibliographie 

Le théâtre du crime. Rodolphe A. Reiss, 1875-1929, cat. exp., (27 juin-25 oct. 2009, Lausanne, Musée de l’Elysée), Lausanne, Presses polytechniques et universitaires romandes, 2009. 

BERTILLON Alphonse, La Photographie judiciaire, Paris, Gauthier-Villars et fils, 1890.

MATHYER Jacques, Rodolphe Archibald Reiss, pionnier de la criminalistique : les années lausannoises et la fondation de lInstitut de police scientifique et de criminologie, Lausanne, Payot, 2000.

MONTANI Isabelle, SAPIN Eric G. et CHAMPOD Christophe, « Rodolphe Archibald Reiss : un criminaliste-criminologue au milieu de la guerre », in VUILLEUMIER Christophe (dir.), La Suisse et la guerre de 1914-1918, Actes du colloque tenu du 10 au 12 septembre 2014 au Château de Penthes, Genève, Slatkine, 2015, p. 545-575.

QUINCHE Nicolas (éd.), Crime, science et identité : anthologie des textes fondateurs de la criminalistique européenne (1860-1930), Genève, Slatkine, 2006.

REISS Rodolphe Archibald, Manuel du portrait parlé (méthode Alphonse Bertillon) à lusage de la police avec vocabulaire français, allemand, italien et anglais, Lausanne/Paris, Th. Sack/A. Schlachter, 1905.

REISS Rodolphe Archibald, « Les méthodes scientifiques dans les enquêtes judiciaires et policières », Archives danthropologie criminelle, de criminologie et de psychologie normale et pathologique, t. 21, 1906, p. 857-876.

REISS Rodolphe Archibald, Manuel de police scientifique (technique) : vols et homicides, Lausanne/Paris, Payot/Félix Alcan, 1911.